La Chine n’a pas tardé à riposter dans la guerre commerciale. En restreignant l’exportation de plusieurs terres rares stratégiques, Pékin cible directement l’industrie technologique américaine, et les premières conséquences ne se sont pas fait attendre.
Tesla, fer de lance de l’innovation technologique et proche de la Maison-Blanche par l’intermédiaire d’Elon Musk, fait figure de première victime. Lors de la présentation de ses résultats trimestriels, le constructeur a reconnu des retards dans la production de son robot humanoïde Optimus, en raison de problèmes d’approvisionnement en aimants fabriqués à partir de terres rares. Elon Musk a indiqué qu’une demande de licence était en cours auprès des autorités chinoises pour pouvoir utiliser ces matériaux.
Cette offensive économique de Pékin intervient après l’introduction de contrôles renforcés sur sept nouveaux métaux, parmi lesquels le terbium, l’yttrium, le dysprosium ou encore le samarium. Chacun de ces éléments joue un rôle clé dans l’industrie, allant de la fabrication d’aimants ultra-résistants pour l’aéronautique militaire aux écrans haute définition et aux moteurs électriques.
L’objectif officiel affiché par Pékin est d’éviter l’utilisation militaire de ces matériaux. Officieusement, il s’agit d’un levier de pression dans la guerre commerciale lancée par Donald Trump, dans un contexte où les États-Unis ont besoin de ces ressources pour soutenir leur industrie de pointe.

La dépendance américaine est d’autant plus criante que si les États-Unis extraient une partie de ces ressources sur leur sol, ils doivent en grande partie les faire raffiner… en Chine, qui contrôle entre 90 % et 100 % des capacités mondiales de traitement selon les métaux concernés.
Face à cette vulnérabilité, Washington tente de réagir. Des mines sont rouvertes, des usines de raffinage sont en construction, et le Pentagone finance directement des projets comme celui de Lynas au Texas. Un partenariat stratégique a également été signé avec l’Ukraine pour sécuriser un accès à de nouveaux gisements.
L’Europe n’est pas épargnée. Après avoir abandonné la filière il y a plusieurs décennies, le continent tente aujourd’hui de rattraper son retard. Grâce au Critical Raw Material Act adopté en 2023, Bruxelles ambitionne de produire 10 % de ses besoins en terres rares d’ici 2030 et de raffiner localement 40 % des métaux critiques. Des projets émergent en Suède, en France et ailleurs, marquant un début de reconquête industrielle.

Cependant, Pékin sait que cette arme économique est à double tranchant. Restreindre l’accès aux terres rares risque d’accélérer les investissements occidentaux pour sécuriser des chaînes d’approvisionnement alternatives. Déjà, la flambée spectaculaire du prix du bismuth, un autre métal dominé par la Chine, montre que les tensions peuvent déstabiliser les marchés mondiaux… mais aussi motiver les grandes puissances à diversifier leurs sources.
La guerre des métaux stratégiques ne fait que commencer. Elle pourrait bien redessiner la carte de la puissance économique mondiale dans les années à venir.
Donis Kanga Grandes Lignes