À peine les bombardements terminés, l’Iran et les États-Unis s’engagent dans un délicat jeu diplomatique, où les signaux d’ouverture se heurtent aux menaces et aux exigences réciproques.
Alors que le monde retient son souffle après les frappes menées contre plusieurs installations nucléaires iraniennes par Israël et les États-Unis, une nouvelle phase de tensions diplomatiques s’ouvre entre Washington et Téhéran. Si un cessez-le-feu a été imposé, les incertitudes persistent sur l’étendue des dommages infligés aux capacités nucléaires iraniennes et sur l’avenir d’un éventuel processus de négociation. Désormais, l’Iran réclame un préalable clair avant tout retour à la table : un engagement des États-Unis à renoncer à toute nouvelle opération militaire.
Donald Trump, qui avait initialement laissé entendre qu’une levée partielle des sanctions était envisageable, a changé de ton en l’espace de quelques jours. Après avoir évoqué « une meilleure chance pour l’Iran de se remettre » de la guerre, il a affirmé sans détour : « Je ne parle pas à l’Iran et je ne leur offre rien ». Pire encore, il a menacé d’une nouvelle salve de frappes en cas de relance du programme d’enrichissement à haut niveau.
Des chaînes américaines comme NBC News et CNN rapportent pourtant que des discussions internes à son administration envisageraient des offres d’incitation comme un programme nucléaire civil évalué à 30 milliards de dollars en échange d’un abandon complet de l’enrichissement. Des informations que la Maison Blanche nie officiellement.
Mais dans les faits, un doute persiste. Téhéran aurait pu mettre à l’abri jusqu’à 408 kg d’uranium enrichi à 60 %, ainsi que certaines centrifugeuses, avant les bombardements. Ces zones d’ombre compliquent toute reprise de négociations, alors même que les frappes ont sérieusement entamé les capacités iraniennes.
Tensions entre menaces et diplomatie
Donald Trump, qui s’était félicité de la faible riposte iranienne, semble aujourd’hui frustré par la posture de défi du guide suprême Ali Khamenei. Ce dernier a revendiqué avoir infligé « une gifle » aux États-Unis. « Pourquoi dit-il qu’il a gagné la guerre, quand il sait que c’est un mensonge ? », s’est indigné Trump. Il est même allé jusqu’à affirmer avoir empêché son exécution : « Je savais où il s’abritait. Je l’ai sauvé d’une mort affreuse. »
Cette déclaration, postée sur le réseau Truth Social, a été reçue avec hostilité à Téhéran. Abbas Araghchi, chef de la diplomatie iranienne, a dénoncé des propos « irrespectueux et inacceptables », et la République islamique a annoncé rompre sa coopération avec l’AIEA, accusée d’agir contre ses intérêts en ne condamnant pas les frappes israéliennes.
Téhéran durcit sa ligne
Si le président Massoud Pezechkian, considéré comme modéré, avait laissé entendre que l’Iran restait prêt à négocier, les signaux envoyés depuis sont beaucoup plus durs. Le Parlement iranien a exigé la suspension totale de la coopération avec l’AIEA. Et bien que les inspecteurs de l’agence ne soient pas expulsés, leur avenir sur le sol iranien reste incertain.
Téhéran entend conditionner tout dialogue à une garantie claire : la fin des bombardements américains. « Si vous dites que vous voulez discuter, mais que vous nous menacez d’une nouvelle frappe si nous ne cédons pas, cela relève de la loi de la jungle », a résumé le vice-ministre des Affaires étrangères Majid Takht-Ravanchi dans une interview à la BBC.
Malgré le cessez-le-feu, les signaux envoyés par les deux camps ne permettent pas d’espérer une désescalade durable. Israël a d’ores et déjà averti qu’il reprendrait les frappes si l’Iran relançait ses efforts nucléaires. Et de son côté, Téhéran pourrait chercher à reconstruire discrètement ses capacités.
Pour Vali Nasr, expert américain du Moyen-Orient, « la pause actuelle ne débouchera pas sur la paix. Sans un nouvel accord clair, les hostilités reprendront sous une forme ou une autre ». À l’instar des « négociations de bazar » évoquées par un diplomate familier du pays, les discussions à venir s’annoncent longues, imprévisibles et semées d’embûches.