Bien qu’un accord de paix ait été signé en juin, le Rwanda et les rebelles du M23 poursuivent leur mainmise sur l’est de la RDC. Un rapport accablant de l’ONU met en lumière les ambitions expansionnistes et économiques de Kigali, en contradiction avec ses engagements.
Un mois à peine après la signature d’un accord de paix censé désamorcer les tensions entre Kinshasa et Kigali, un rapport confidentiel du groupe d’experts de l’ONU, révélé par le média belge De Standaard, jette une lumière crue sur les ambitions réelles du Rwanda. Sous la houlette du président Paul Kagame, Kigali et les rebelles du M23 poursuivraient en réalité une politique de mainmise territoriale et économique sur l’est de la République démocratique du Congo (RDC).
Selon le rapport, le Rwanda n’aurait nullement l’intention de retirer ses troupes comme prévu dans l’accord. Au contraire, Kigali cherche à établir un État parallèle dans les provinces congolaises du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. « Des sources internes à l’armée rwandaise et au gouvernement confirment que l’objectif ultime est le contrôle du territoire et des ressources naturelles congolaises », indique le document dirigé par l’experte belge Mélanie De Groof.
Une occupation systémique
Dans les villes stratégiques de Goma et Bukavu, les forces du M23 appuyées logistiquement et militairement par Kigali ont mis en place une administration parallèle : gouverneurs de province, maires, police, services de douane, de migration, et contrôle des sites miniers. Le M23, qui ne cache plus ses velléités de rester en place « quoi qu’il advienne des négociations », serait désormais un outil d’occupation à visage institutionnel.
Le rapport met en évidence une stratégie claire : s’implanter pour durer, en créant une administration de substitution à celle de l’État congolais, vidée de sa substance. Une gouvernance de facto, centrée sur l’exploitation des richesses locales.
Le pillage des ressources
Les forces du M23 et les troupes rwandaises ont pris le contrôle de mines stratégiques, notamment à Rubaya, riches en coltan et en étain. Depuis la chute de Bukavu en février, d’autres sites ont été ajoutés à leur butin. Le Rwanda ne se cache plus : c’est une guerre pour les ressources, menée sous couvert de stabilisation sécuritaire.
Kigali sous surveillance internationale
Ces révélations contredisent frontalement les engagements pris par le Rwanda dans l’accord de paix de juin. Loin d’un processus de désescalade, le rapport de l’ONU suggère une opération d’annexion rampante, orchestrée avec méthode et appétit. Kigali dément toute intention de s’approprier les ressources congolaises, mais le silence radio observé face aux dernières accusations onusiennes intrigue.
Alors que la RDC fait appel à la communauté internationale pour mettre fin à ce qu’elle qualifie d’agression déguisée, les Nations unies appellent à une enquête approfondie et à une pression diplomatique accrue sur Kigali.
Paul Lamier Grandes Lignes