Qatar Airways accélère ses manœuvres sur le continent africain. En signant un protocole d’accord avec Kenya Airways, la compagnie du Golfe confirme une stratégie d’expansion méthodique, fondée sur des partenariats ciblés, des prises de participation et des projets d’infrastructures majeurs.
L’accord, dévoilé début juillet, prévoit notamment l’ajout d’un troisième vol quotidien entre Doha et Nairobi, en partage de code avec Kenya Airways, ainsi que l’ouverture d’une liaison Mombasa-Doha opérée par la compagnie kényane. Au-delà des passagers, ce rapprochement vise également le fret, la maintenance, et l’optimisation des services au sol.
Un réseau africain en construction
Ce partenariat s’inscrit dans un plan plus large de consolidation de la présence de Qatar Airways en Afrique. À l’Est du continent, la compagnie détient 60 % du capital de RwandAir, avec laquelle elle cofinance la construction du futur aéroport international de Bugesera au Rwanda un projet de 2 milliards USD pour 14 millions de passagers annuels d’ici 2032. En parallèle, les vols Doha-Kigali ont repris après trois ans de suspension.
En Afrique australe, Qatar Airways a acquis en 2024 une part de 25 % dans Airlink, compagnie sud-africaine active dans 15 pays. Cette opération vise à renforcer la couverture du réseau régional, au-delà des grandes capitales.
En Afrique de l’Ouest, le Qatar explore aussi de nouveaux points d’ancrage : une liaison directe Cotonou-Doha est à l’étude, en partenariat avec la nouvelle compagnie nationale du Bénin, Amazone Airlines. Cette connexion, soutenue politiquement, ambitionne de dynamiser tourisme, échanges culturels et flux logistiques.
Un pari économique calibré
Avec un bénéfice net de 2,15 milliards de dollars (+28 %) et 43 millions de passagers transportés sur l’exercice 2024-2025, Qatar Airways revendique des résultats record. Son directeur général, Badr Mohammed Al-Meer, voit dans l’Afrique « un écosystème aérien et économique en pleine transformation », propice à des alliances durables.
Mais derrière ces ambitions se dessinent plusieurs inconnues. La rentabilité réelle des investissements africains du groupe reste à documenter. Le protocole d’accord avec Kenya Airways devra surmonter les défis d’intégration opérationnelle, dans un environnement encore fragmenté sur le plan réglementaire. De même, le succès du projet Bugesera ou de la coopération avec Airlink dépendra de la stabilité politique et de la montée en puissance de la demande régionale.
Qatar Airways n’avance donc pas en conquérant, mais en stratège. Dans un ciel africain encore balisé par des intérêts nationaux et des initiatives régionales hétérogènes, sa trajectoire prudente pourrait faire école ou se heurter aux limites structurelles d’un marché encore en pleine mutation.