Du 27 au 31 mai 2025, Abidjan accueille les Assemblées Annuelles de la Banque africaine de développement (BAD), un rendez-vous d’importance pour l’institution comme pour ses 81 pays membres. Cette édition sera marquée par un passage de relais à la présidence, après deux mandats d’Akinwumi Adesina (2015-2025), dont le bilan a contribué à redéfinir le rôle de la banque dans le développement du continent.
Un mandat transformateur
Sous la direction d’Adesina, la BAD a connu une montée en puissance notable. Son capital autorisé a été triplé, passant de 93 à 318 milliards de dollars, renforçant ainsi sa capacité à financer des projets structurants. Sa note de crédit AAA a permis l’émission d’obligations durables sur les marchés, comme celle de 2 milliards de dollars en 2024.
Structurée autour des « High Five » énergie, alimentation, industrialisation, intégration régionale et qualité de vie la stratégie d’Adesina a eu un impact tangible : 25 millions de personnes connectées à l’électricité en dix ans, projets d’infrastructures transnationaux, appui massif à l’agriculture, et amélioration de l’accès aux services essentiels pour plus de 300 millions de personnes.
Un scrutin ouvert, cinq visions
L’élection du nouveau président, prévue le 29 mai, oppose cinq profils aux sensibilités diverses :
- Amadou Hott (Sénégal) : ancien ministre de l’Économie, il défend une BAD modernisée, proche du secteur privé. Il mise sur la continuité du modèle Adesina.
- Sidi Ould Tah (Mauritanie) : président sortant de la BADEA, il met en avant la résilience climatique, l’inclusion et la mobilisation de financements innovants.
- Samuel Maimbo (Zambie) : vice-président de la Banque mondiale, il incarne une approche technocratique, centrée sur la rigueur financière et les partenariats stratégiques.
- Mahamat Abbas Tolli (Tchad) : ex-gouverneur de la BEAC, il veut orienter la BAD vers l’énergie verte et l’inclusion financière, malgré un soutien régional limité.
- Bajabulile Swazi Tshabalala (Afrique du Sud) : seule femme en lice, elle met en avant une vision sociale forte et l’égalité de genre.
Le vote pourrait également refléter des équilibres linguistiques et géopolitiques, avec une possible alternance francophone après une décennie anglophone, et un rôle déterminant des actionnaires non africains (40 % des droits de vote).
Prolonger la dynamique dans un monde incertain
L’environnement dans lequel s’inscrit cette élection est marqué par une série de défis globaux : montée des tensions commerciales, rétrécissement de l’aide au développement, urgence climatique. La BAD devra maintenir son rôle d’intermédiaire crédible et de levier financier pour un continent encore confronté à des poches de pauvreté massive et des vulnérabilités structurelles.
Le lancement du Mécanisme Africain de Stabilité Financière, l’accompagnement de la ZLECAf, et la mobilisation de financements pour les infrastructures, l’agriculture et les énergies renouvelables seront des priorités du nouveau mandat.
Un moment charnière
À l’heure où la scène internationale se recompose, les Assemblées de 2025 représentent une opportunité pour repositionner la BAD dans un rôle stratégique de catalyseur de développement. Le choix du futur président ne portera pas seulement sur un style de gouvernance, mais aussi sur la capacité à faire face aux défis systémiques de l’Afrique et à bâtir une autonomie financière durable.
Comme le résumait Akinwumi Adesina : « Le développement de l’Afrique passe aussi par les Africains eux-mêmes. »