Le Camerounais George Elombi a été désigné président de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) le 28 juin 2025, lors de l’Assemblée générale annuelle des actionnaires de l’institution panafricaine à Abuja. Une décision hautement symbolique, qui place pour la première fois un ressortissant d’Afrique centrale à la tête de cette puissante banque dédiée au développement du commerce intra-africain.
Le Dr Elombi succédera en septembre prochain au Nigérian Benedict Oramah, dont le bilan a marqué un tournant dans l’expansion de la Banque. Sa désignation vient consacrer une trajectoire ascendante au sein même de l’institution : entré à Afreximbank en 1996 comme simple juriste, il en est aujourd’hui vice-président exécutif chargé de la gouvernance, des affaires juridiques et des services corporatifs.
Cette nomination résonne comme une victoire pour la diplomatie économique du Cameroun, actionnaire à double titre de la Banque à travers l’État et par l’entremise de la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS). Elle redonne également de la visibilité à une région souvent marginalisée dans les grandes institutions continentales, au profit de puissances économiques plus exposées comme le Nigeria, l’Afrique du Sud ou l’Égypte.
Une vision d’intégration et d’industrialisation
Connu pour sa rigueur, sa discrétion et sa connaissance fine des dynamiques juridiques et commerciales africaines, George Elombi a été l’un des artisans de la réponse d’Afreximbank à la pandémie de Covid-19. Il a piloté les mécanismes juridiques et financiers ayant permis de mobiliser plus de deux milliards de dollars pour les vaccins à destination de l’Afrique et des Caraïbes. Une opération sans précédent, qui a renforcé l’image de la Banque comme acteur central de la souveraineté sanitaire du continent.
À la tête de l’institution, le nouveau président entend accélérer la transformation structurelle du commerce africain. « Nous devons faire d’Afreximbank une force d’industrialisation pour l’Afrique », a-t-il déclaré, promettant de poursuivre les chantiers entamés sous Oramah : renforcer les chaînes de valeur continentales, soutenir la mise en œuvre de la ZLECAf, et porter les actifs de la Banque à 250 milliards de dollars d’ici dix ans.
Un virage panafricain dans un contexte de compétition
La montée en puissance d’Afreximbank s’inscrit dans un moment de recomposition des alliances économiques sur le continent. Face à la résurgence de logiques protectionnistes, aux incertitudes sur les marchés financiers mondiaux et aux nouvelles ambitions de la Chine, des États du Golfe ou de l’Inde, la Banque apparaît comme un levier de coordination, de financement et de souveraineté régionale.
Avec George Elombi, la direction d’Afreximbank pourrait prendre un tournant plus résolument panafricain. L’enjeu dépasse les frontières camerounaises : il s’agit de démontrer que l’Afrique centrale, longtemps sous-capitalisée et moins intégrée aux circuits du commerce régional, peut devenir une plateforme active de l’économie continentale. À cet égard, la nomination d’un Camerounais à la tête de la Banque envoie un signal fort.
Une trajectoire incarnant l’afro-compétence
Formé à l’Université de Yaoundé, puis à la London School of Economics où il a obtenu un doctorat en arbitrage commercial, George Elombi incarne cette génération de cadres africains binationaux, ancrés sur le continent mais parfaitement intégrés aux normes et exigences des marchés globaux. Sa carrière est emblématique d’un profil rare : alliant excellence juridique, engagement pour l’intégration régionale et fidélité institutionnelle.
Le défi qui l’attend est immense. Afreximbank, dont le rôle s’est accru au cours de la dernière décennie, est aujourd’hui appelée à devenir un véritable pilier de la transformation économique africaine. Son nouveau président devra à la fois consolider les acquis et poser les fondations d’un modèle financier résilient, inclusif et adapté aux réalités africaines.
Adonis Kanga Grandes Lignes












