La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac) a tenu, du 9 au 10 septembre à Bangui, une session extraordinaire marquée par un passage de témoin hautement symbolique. Après deux années à la tête de l’organisation, le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a remis le flambeau à son homologue congolais, Denis Sassou-N’Guesso. Derrière les sourires et les hymnes, les défis qui attendent la Cémac sont immenses.
Une transition dans la continuité
En clôture du sommet, Touadéra a cédé la présidence tournante à Sassou-N’Guesso en insistant sur l’importance du rôle stratégique de la sous-région. « Notre sous-région est une terre d’opportunité », a-t-il souligné, rappelant que le chômage, la dette et la pauvreté imposent aux dirigeants d’engager un véritable sursaut collectif.
Figure politique majeure de l’Afrique centrale, Denis Sassou-N’Guesso a déjà eu à diriger plusieurs fois les instances régionales. En reprenant la présidence de la Cémac, il entend placer au centre de son mandat les thématiques de panafricanisme, de libération et de développement. Une ambition qui rejoint son propre discours de longévité politique, mais qui devra convaincre au-delà des symboles.
L’urgence économique
Créée en 1994, la Cémac traverse une période critique. La croissance est faible, les dettes publiques restent élevées et les tensions sociales s’exacerbent. Malgré des ressources naturelles abondantes (pétrole, gaz, minerais), la sous-région peine à transformer son potentiel en prospérité partagée. La mise en place d’un mécanisme efficace pour la libre circulation des biens et des personnes, annoncée au sommet, sera un premier test de crédibilité.
Un horizon sécuritaire instable
Les crises politiques et sécuritaires au Tchad, en Centrafrique ou encore dans les zones frontalières fragilisent les perspectives d’intégration. L’ombre des tensions internes, couplée aux ingérences extérieures, pèse sur la stabilité. Dans ce climat, la coopération sécuritaire que veut promouvoir Sassou-N’Guesso sera scrutée de près.
Entre opportunité et incertitude
La Cémac se trouve à un tournant. Ses dirigeants veulent projeter l’image d’une communauté soudée et actrice d’un nouvel ordre économique mondial. Mais l’écart reste considérable entre les déclarations d’intention et la réalité vécue par les populations. Sassou-N’Guesso hérite d’une institution qui cherche toujours à s’affirmer face aux défis de la mondialisation, mais aussi face à ses propres blocages internes.
La question clé reste entière : Denis Sassou-N’Guesso saura-t-il transformer cette présidence en véritable moteur de relance régionale, ou son mandat restera-t-il un épisode de plus dans une longue série de promesses non tenues ?
Paul Lamier Grandes Lignes












