Alors que la guerre en Ukraine s’enlise, la Russie fait face à une équation de plus en plus complexe : ses pertes militaires semblent désormais dépasser ses capacités de recrutement. Selon plusieurs indicateurs budgétaires et militaires, Moscou peine à renouveler ses effectifs au front, malgré des efforts constants pour élargir la base de mobilisation.
D’après les données compilées par Janis Kluge, économiste au German Institute for International and Security Affairs, les recrutements militaires russes ont ralenti au printemps 2025. En mai et juin, le nombre de nouvelles recrues est passé sous la barre des 30 000 par mois, contre environ 40 000 lors des mois précédents.
Or, selon les renseignements ukrainiens, les forces russes subiraient entre 30 000 et 35 000 pertes (morts et blessés) chaque mois, avec un total estimé à plus d’un million depuis février 2022. Actuellement, environ 620 000 soldats russes seraient déployés sur le théâtre ukrainien.
Des mesures d’urgence
Face à ce déséquilibre, la Douma a adopté fin juin une loi autorisant les apatrides résidant en Russie à intégrer les rangs de l’armée. Selon les estimations, près de 90 000 apatrides vivent sur le territoire russe, dont plusieurs milliers pourraient être mobilisables.
En parallèle, Moscou continue de recruter des combattants étrangers, majoritairement issus d’ex-républiques soviétiques, mais aussi de pays asiatiques comme la Corée du Nord, voire de Cuba. Sur les réseaux chinois, de nombreuses vidéos circulent, appelant la jeunesse à s’engager pour la Russie, vantant des avantages financiers et une cause idéologique partagée.
Plus troublant encore, le Kremlin aurait mobilisé plusieurs centaines de femmes originaires de pays africains, parfois mineures, pour travailler à l’assemblage de drones kamikazes Shahed dans des usines militaires, notamment en république du Tatarstan.
Une guerre toujours plus coûteuse
Si les pertes quotidiennes ont légèrement diminué au cours des deux dernières semaines avec une moyenne d’environ 1 000 soldats elles restent bien supérieures aux niveaux enregistrés en 2022 et 2023. Ce niveau d’attrition s’explique notamment par l’intensification de l’offensive estivale russe dans les oblasts de Donetsk, Kharkiv et Soumy.
Alors que le Kremlin cherche à éviter une mobilisation générale impopulaire, il tente de combler le déficit humain par des stratégies de contournement : nouvelles lois, étrangers sous contrat, propagande ciblée. Mais à mesure que le conflit s’enlise et que les pertes s’accumulent, la soutenabilité militaire et humaine de l’opération devient plus incertaine.
Paul Lamier Grandes Lignes