Selon les données publiées le 21 mai par le Global Forest Watch (GFW), la République démocratique du Congo a perdu 590 000 hectares de forêts tropicales primaires en 2024. Cette superficie place le pays au troisième rang mondial, derrière le Brésil (2,82 millions d’hectares) et la Bolivie (1,48 million d’hectares), dans le classement des pertes les plus importantes de forêts primaires au cours de l’année.
Il s’agit du volume le plus élevé jamais enregistré sur une seule année pour la RDC, qui abrite le deuxième plus grand massif forestier tropical au monde, après l’Amazonie. En hausse de 60 000 hectares par rapport à 2023, cette perte de couverture forestière soulève des inquiétudes quant aux impacts sur la biodiversité, le climat mondial et les moyens de subsistance de millions de Congolais.
Des facteurs internes aux dynamiques globales
Contrairement à d’autres régions où les incendies de grande ampleur figurent parmi les principaux moteurs de la déforestation, les pertes forestières en RDC résultent avant tout d’activités humaines localisées. L’expansion agricole, l’exploitation artisanale du bois, et la production de charbon de bois sont identifiés comme les principaux facteurs.
La pression sur les ressources forestières est amplifiée par la dépendance massive des ménages congolais à la biomasse. D’après la Banque mondiale, 98,8 % de l’énergie domestique consommée en RDC provient de cette source, avec 81,8 % pour le bois de chauffe et 17 % pour le charbon de bois. Cette dépendance, combinée à l’absence d’alternatives énergétiques accessibles, alimente une dynamique de déforestation structurelle.
Une tendance continentale
Au niveau mondial, le GFW recense une perte totale de 6,7 millions d’hectares de forêts tropicales primaires en 2024. L’Afrique est particulièrement touchée : après la RDC, le Cameroun arrive en deuxième position sur le continent, avec 100 000 hectares perdus l’an dernier, soit la huitième perte la plus élevée au monde.
Ces données confirment une tendance préoccupante. En dépit des engagements pris au niveau international, notamment à travers les COP ou l’Initiative pour les forêts d’Afrique centrale (COMIFAC), les progrès concrets en matière de réduction de la déforestation restent limités.
Une transition énergétique en question
Le lien entre précarité énergétique et déforestation en RDC pose avec acuité la question d’une transition énergétique inclusive. Le défi consiste à proposer des solutions d’accès à l’énergie moins destructrices pour l’environnement et économiquement viables à grande échelle. En l’absence d’une telle transition, les forêts congolaises continueront à faire office de principal réservoir énergétique, avec les conséquences que cela implique.
Alors que le pays s’apprête à revoir ses politiques de gestion des ressources naturelles dans le cadre de ses engagements climatiques, la publication du GFW pourrait servir de signal d’alarme. Reste à savoir si les réponses institutionnelles seront à la hauteur des enjeux.