5 Nov 2025, mer

 Kigali claque la porte de la CEEAC

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Le retrait spectaculaire du Rwanda de la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC), annoncé samedi 7 juin 2025, illustre la profondeur du fossé politique qui le sépare désormais de la République démocratique du Congo (RDC). Officiellement, Kigali justifie sa décision par un « fonctionnement devenu contraire aux principes » de la communauté. Officieusement, c’est la RDC qui est directement mise en cause, accusée par le Rwanda d’avoir dévoyé l’organisation à des fins de règlement de comptes politique.

La présidence tournante confisquée : un casus belli pour Kigali

Le Rwanda aurait dû prendre la présidence tournante de la CEEAC, conformément à l’article 6 de son traité constitutif. Mais lors du 26ᵉ sommet de l’organisation, tenu à Malabo, ce droit a été bloqué par une coalition menée par Kinshasa, soutenue notamment par le Burundi. Résultat : la Guinée équatoriale a vu son mandat prolongé d’un an.

Kigali ne mâche pas ses mots dans le communiqué publié par son ministère des Affaires étrangères : il y dénonce « l’instrumentalisation de la CEEAC par la RDC, avec le soutien de certains États membres », pointant une volonté délibérée de Kinshasa d’empêcher le Rwanda d’accéder à la présidence, en violation des règles internes de l’organisation.

Pour Kigali, c’est une manœuvre visant à écarter un membre gênant dans un contexte de tensions bilatérales persistantes. « Le droit du Rwanda à la présidence rotative a été délibérément ignoré pour imposer le diktat de la RDC », accuse frontalement le communiqué.

Une instrumentalisation politique de l’appareil régional

Selon un haut responsable de la CEEAC cité anonymement par l’AFP, le représentant de la RDC aurait clairement fait savoir que son pays ne participerait à aucune activité de la communauté si Kigali en prenait la présidence. Le Burundi a adopté une position similaire. Ce blocage organisé, selon Kigali, entache profondément la neutralité de l’organisation et l’asservit à des intérêts politiques particuliers.

Pour le Rwanda, il ne fait aucun doute que la RDC est à l’origine d’un « détournement politique de l’organisation régionale », devenu selon les mots du communiqué, un « outil aux mains de certains États membres pour exclure et marginaliser d’autres ».

Un précédent révélateur : Kinshasa déjà accusée en 2023

Ce n’est pas la première fois que Kigali accuse Kinshasa de chercher à l’isoler au sein des structures régionales. En 2023 déjà, lors du 22ᵉ sommet de la CEEAC organisé à Kinshasa, le Rwanda avait dénoncé une « exclusion illégale », dans une lettre adressée à l’Union africaine. À l’époque, la présidence congolaise de l’organisation avait été l’occasion pour Kigali d’accuser Kinshasa de verrouiller les mécanismes décisionnels au sein de l’institution.

Cette répétition des blocages alimente la thèse rwandaise selon laquelle la RDC chercherait systématiquement à saboter la participation du Rwanda à la vie régionale. Le communiqué du 7 juin évoque d’ailleurs une « confirmation de l’incapacité de l’organisation à faire respecter ses propres règles ».

Une rupture aux conséquences régionales

En annonçant son retrait immédiat, Kigali acte une rupture diplomatique majeure qui pourrait affaiblir durablement les mécanismes régionaux de coopération et de sécurité. Le Rwanda, poids lourd militaire et diplomatique de l’Afrique centrale, quitte une scène où il entendait jouer un rôle majeur.

Cette décision pourrait aussi avoir des répercussions sur la coordination des politiques de sécurité, alors que l’est de la RDC reste en proie à des violences chroniques, souvent attribuées à tort ou à raison à des soutiens rwandais aux groupes armés.

L’accusation du Rwanda est claire : la RDC, par une logique d’exclusion et de pression, aurait transformé la CEEAC en une instance partisane, incapable de respecter ses règles les plus élémentaires. Si Kigali se retire, c’est non seulement pour protester contre cette dérive, mais aussi pour signaler à ses pairs qu’il refuse de légitimer une organisation devenue selon lui l’instrument diplomatique d’un adversaire régional.

Paul Lamier Grandes Lignes

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