L’annonce de Donald Trump de restreindre l’entrée des ressortissants tchadiens aux États-Unis a déclenché une réponse ferme de N’Djamena. Le président Mahamat Idriss Déby Itno a ordonné la suspension de la délivrance de visas aux citoyens américains, invoquant le principe de réciprocité et dénonçant une décision injustifiée. Pour les autorités tchadiennes, cette mesure marque une rupture dans une relation diplomatique jusque-là relativement stable.
Le gouvernement tchadien n’a pas seulement répondu sur le plan administratif. Il a aussi opté pour une communication politique forte, saluée sur le continent. Là où d’autres pays visés par le “travel ban” américain ont adopté un ton plus conciliant, comme la Sierra Leone ou le Congo-Brazzaville, N’Djamena a mis en avant son rôle dans la lutte contre le terrorisme et rejeté l’argumentaire américain.
Le ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Sabre Fadoul, s’est dit surpris par une décision “injustifiée”, fondée sur une “lecture erronée de la contribution du Tchad à la sécurité régionale”. Le président Déby, lui, a exprimé sa consternation face à ce qu’il considère comme un camouflet diplomatique.
Sécurité et immigration : les justifications américaines
Outre les enjeux sécuritaires, la Maison-Blanche invoque également le non-respect des règles de séjour par certains ressortissants tchadiens. Selon Washington, le taux de dépassement de visa enregistré en 2022 et 2023 serait “inacceptable”. Une justification qui peine à convaincre au Tchad, où cette explication est perçue comme secondaire, voire déplacée, au regard des efforts menés dans la lutte antiterroriste.
Un signal pour d’autres pays africains
La réplique tchadienne, jugée ferme et symboliquement forte, pourrait selon plusieurs analystes inciter d’autres États africains à adopter une posture plus affirmée vis-à-vis de Washington. L’Union africaine, dans un communiqué, a exprimé sa “préoccupation” et invité les États-Unis à privilégier une approche plus concertée dans leurs décisions migratoires.
Des canaux de discussion maintenus
Malgré la tension, les deux capitales n’ont pas rompu le dialogue. Un groupe de travail bilatéral a été mis en place pour tenter de désamorcer la crise. Il devra examiner les conditions d’un possible assouplissement des restrictions américaines, à condition que N’Djamena présente des garanties considérées comme “satisfaisantes” par Washington.
L’objectif commun semble être d’éviter une dégradation durable des relations. Mais pour le Tchad, cette affaire pourrait aussi marquer un tournant : celui d’une affirmation diplomatique plus frontale face à une puissance partenaire, mais parfois imprévisible