L’incident est passé relativement inaperçu mais revêt une charge symbolique et politique forte. Lundi 7 avril, lors d’une cérémonie commémorant le génocide des Tutsi au siège de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba, l’ambassadeur d’Israël en Éthiopie, Avraham Neguise, a été prié de quitter la salle avant l’ouverture officielle de l’événement. En toile de fond, les vives tensions entre Israël et plusieurs États africains autour de la guerre à Gaza.
Selon des sources diplomatiques interrogées par l’AFP, l’ambassadeur israélien avait pourtant participé à la première partie de la journée — une marche de solidarité organisée dans l’enceinte du siège de l’UA. Mais à l’heure d’ouvrir la séance officielle, le président de la Commission de l’Union africaine, le Djiboutien Mahamoud Ali Youssouf, a expressément refusé de lancer l’événement en sa présence.
« Il était assis à une place très visible, proche des représentants américains, et tout a été retardé jusqu’à ce qu’on lui demande de sortir », confie une source diplomatique. Une autre indique qu’elle ne peut confirmer si cette exclusion faisait suite à des protestations officielles d’États membres concernant la situation à Gaza.
La réaction israélienne n’a pas tardé. Le ministère des Affaires étrangères, cité par The Times of Israel, a dénoncé un « comportement inacceptable » et « scandaleux », en soulignant que l’ambassadeur avait été officiellement invité à cette commémoration. L’État hébreu accuse le président de la Commission d’avoir « introduit des considérations politiques anti-israéliennes » lors d’un moment de mémoire censé transcender les clivages.
L’incident s’inscrit dans un climat de défiance croissante entre Israël et plusieurs poids lourds de l’Union africaine, en particulier depuis les attaques du 7 octobre 2023 et la riposte militaire israélienne dans la bande de Gaza. L’UA a critiqué à plusieurs reprises ce qu’elle considère comme une réponse disproportionnée, allant jusqu’à évoquer un « possible génocide » et appelant à un cessez-le-feu immédiat.
La présidence de la Commission de l’UA a récemment changé de mains : Mahamoud Ali Youssouf, ancien ministre des Affaires étrangères de Djibouti pendant près de vingt ans, est entré en fonction en février 2025. Son pays, par la voix du président Ismaïl Omar Guelleh, avait qualifié la situation à Gaza de « génocide » dès mars 2024.
Le passif entre Israël et l’organisation panafricaine ne date pas d’hier. En 2022, l’UA avait échoué à trancher sur l’accréditation d’Israël en tant qu’observateur, une initiative bloquée notamment par l’Algérie et l’Afrique du Sud. En 2023 déjà, une diplomate israélienne avait été expulsée de l’Assemblée annuelle de l’Union africaine.