Les figures majeures de l’opposition ivoirienne ne figureront pas sur la liste électorale définitive. Une décision qui bouleverse le paysage politique à quatre mois d’un scrutin présidentiel déjà sous tension.
À quatre mois du scrutin présidentiel prévu en octobre, la Commission électorale indépendante (CEI) a publié mercredi 4 juin la liste électorale définitive. Quatre figures emblématiques de l’opposition en sont absentes : Tidjane Thiam, Laurent Gbagbo, Guillaume Soro et Charles Blé Goudé. Tous sont désormais exclus de la course à la magistrature suprême.
Une décision qui, tout en respectant les procédures judiciaires en vigueur selon les autorités, ravive de profondes tensions politiques. Elle suscite déjà des réactions véhémentes au sein des partis concernés.
Radiations confirmées
Tidjane Thiam, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), a été radié de la liste en avril, au motif qu’il n’aurait pas détenu la nationalité ivoirienne lors de son inscription. De leur côté, Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro sont radiés depuis plusieurs années en raison de condamnations judiciaires. Aucun d’entre eux n’a été réintégré.
Le président sortant, Alassane Ouattara, 83 ans, est bien présent sur la liste. Il n’a pas encore annoncé s’il briguerait un quatrième mandat.
Réactions indignées et recours internationaux
Dans un communiqué, Tidjane Thiam dénonce « un exemple éloquent de la dérive démocratique du pays ». Il a annoncé avoir saisi le Comité des droits de l’homme des Nations unies. Son avocat, Mathias Chichportich, parle d’une « décision arbitraire et discriminatoire, insusceptible de recours », et d’une violation des engagements internationaux du pays.
Le Parti des peuples africains Côte d’Ivoire (PPA-CI) de Laurent Gbagbo déplore, de son côté, une attitude de « passage en force ». Le secrétaire général du parti, Jean-Gervais Tchéidé, assure : « Nous n’allons pas les laisser faire ».
Un climat politique fragilisé
D’autres candidats d’opposition restent qualifiés, à l’image de Simone Gbagbo, Jean-Louis Billon ou Pascal Affi N’Guessan. Pourtant, le climat reste pesant. « Les conditions ne sont pas réunies pour une élection pacifique », a déclaré Simone Gbagbo.
La CEI, quant à elle, défend l’impossibilité technique d’une révision électorale si proche du scrutin. Elle rappelle qu’une telle procédure prend entre six et sept mois. Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, président de la CEI, appelle au respect des décisions judiciaires et réaffirme l’indépendance de son institution.
La liste électorale comprend 8,7 millions d’électeurs, dans un pays où près de la moitié des 30 millions d’habitants ont moins de 18 ans. Dans ce contexte démographique et politique, l’absence des principaux opposants jette une ombre sur la légitimité du scrutin à venir. Plusieurs partis ont suspendu leur participation aux instances de la CEI depuis avril, accentuant le climat de méfiance généralisée.