La paix déjà fragile au Soudan du Sud vacille. L’arrestation brutale du vice-président Riek Machar, survenue mercredi 26 mars à Juba, pourrait marquer la fin de l’accord de paix de 2018, signé pour mettre un terme à des années de guerre civile meurtrière. Selon son parti, le SPLM-IO, des forces lourdement armées, dirigées par le ministre de la Défense et le chef des services de sécurité, ont fait irruption dans sa résidence et l’ont interpellé.
Une arrestation qualifiée de trahison
Le SPLM-IO a dénoncé un acte de « trahison » et de « rupture d’engagement » de la part du président Salva Kiir, qu’il accuse de vouloir écarter Machar pour consolider son pouvoir. Oyet Nathaniel, vice-président du SPLM-IO, a annoncé dans un communiqué que l’accord de paix était désormais « caduc », ouvrant la voie à une nouvelle période d’instabilité.
Inquiétudes régionales et internationales
La communauté internationale a rapidement exprimé sa vive inquiétude. L’Union africaine a appelé au dialogue et à la retenue, tandis que le département d’État américain a demandé l’annulation immédiate de l’arrestation pour éviter une escalade. Le président kényan William Ruto a annoncé l’envoi d’un médiateur pour tenter de désamorcer la crise.
De son côté, la commission des Nations unies sur les droits humains a mis en garde contre un retour « catastrophique » au conflit, avec des conséquences dramatiques pour des millions de civils.
Montée des tensions sur le terrain
Si la capitale Juba reste calme en apparence, une forte présence militaire est signalée autour de la résidence de Machar. Un char d’assaut a même été déployé. Les tensions sont palpables : le parti armé de Machar, la SPLA-IO, accuse les troupes fidèles à Kiir d’avoir attaqué deux de ses camps d’entraînement aux abords de la capitale. Des attaques que les forces loyalistes nient, accusant au contraire leurs rivaux de provocations.
Un climat sécuritaire délétère
Cette arrestation intervient dans un climat déjà tendu. Depuis février, plus de 20 proches de Machar ont été arrêtés, certains maintenus en détention sans contact extérieur. Sur le plan humanitaire, la mission de l’ONU (Minuss) dénonce des attaques indiscriminées contre les civils, notamment dans le nord-est, où des bombardements impliquant des substances hautement inflammables ont été signalés.
Face à la dégradation rapide de la situation, plusieurs chancelleries occidentales (Allemagne, Norvège, États-Unis, Royaume-Uni) ont fermé ou réduit leurs ambassades, exhortant leurs ressortissants à quitter le pays. Les tentatives de médiation proposées par l’Union européenne, le Canada et les Pays-Bas, restent pour l’instant sans effet.

Vers un point de non-retour ?
Alors que Salva Kiir, âgé de 73 ans, est soupçonné de vouloir assurer sa succession en affaiblissant son rival, la communauté internationale redoute une explosion du conflit. L’arrestation de Riek Machar pourrait bien devenir le détonateur d’une nouvelle guerre civile, dans un pays déjà ravagé par les violences, la pauvreté et l’instabilité chronique depuis son indépendance en 2011.