Quelques mois après avoir imposé de nouvelles restrictions migratoires et tarifaires visant plusieurs pays africains, Donald Trump tend la main à une poignée de dirigeants du continent. Ce mercredi 9 juillet, cinq chefs d’État africains sont reçus à Washington pour un mini-sommet inédit, centré sur les échanges commerciaux, la sécurité et la redéfinition des partenariats stratégiques.
Parmi les invités : Bassirou Diomaye Faye (Sénégal), Mohamed Ould Ghazouani (Mauritanie), Brice Clotaire Oligui Nguema (Gabon), Umaro Sissoco Embaló (Guinée-Bissau) et Joseph Boakai (Liberia). Tous ont été conviés à la Maison Blanche dans un format resserré qui traduit la volonté de l’administration Trump de relancer sa diplomatie africaine sur des bases nouvelles : moins d’aide, plus d’accords bilatéraux.
Diomaye Faye discret mais stratégique
Le président sénégalais a été accueilli à la base aérienne d’Andrews. Discret depuis son arrivée, il entend néanmoins profiter de ce sommet pour affirmer le rôle du Sénégal dans les dynamiques régionales de réforme. Doté de ressources naturelles majeures gaz offshore, or, phosphate, zircon le pays attire les convoitises américaines dans un contexte mondial de diversification des chaînes d’approvisionnement.
Depuis l’élection de Diomaye Faye, Dakar affiche une volonté de refondation économique, insistant sur la souveraineté régionale et la réforme de la CEDEAO. Le président sénégalais devrait défendre une coopération fondée sur des partenariats équitables et des investissements productifs.
Le Liberia en campagne économique
Joseph Boakai, président du Liberia, mène une offensive diplomatique ciblée à Washington. Il a rencontré le conseiller Afrique de la Maison Blanche, Massad Boulous, et a lancé à Philadelphie un bureau de commerce et d’investissement, espérant repositionner son pays dans les flux d’affaires transatlantiques. Cette dynamique reflète un changement de ton à Monrovia, où l’exécutif entend se libérer de l’image d’un État fragile.
La Guinée-Bissau à l’offensive
Umaro Sissoco Embaló a profité de son passage à Washington pour présenter la Guinée-Bissau comme un marché stable et ouvert. Lors d’une table ronde à la Chambre de commerce américaine, il a mis en avant un nouveau code des investissements et des priorités claires : agro-industrie, énergies renouvelables, numérique. Cette invitation à la Maison Blanche est perçue comme une reconnaissance diplomatique rare pour Bissau.
Le Gabon mise sur ses ressources
Brice Clotaire Oligui Nguema a signé un accord stratégique avec Millennial Potash pour exploiter le gisement de Mayumba. Ce contrat de 500 millions de dollars pourrait créer près de 1000 emplois locaux. Libreville entend valoriser ses ressources in situ pour sortir d’un modèle extractiviste brut et renforcer son autonomie économique. Le Gabon cherche aussi à renforcer sa coopération sécuritaire avec les États-Unis, notamment dans le golfe de Guinée.
La Mauritanie sous l’œil migratoire
De son côté, Mohamed Ould Ghazouani devra répondre aux attentes américaines sur la question migratoire. Des milliers de jeunes Mauritaniens ont rejoint clandestinement les États-Unis via l’Amérique centrale, attirant l’attention des autorités américaines. Washington attend de Nouakchott des engagements sur la gestion des flux, dans un contexte de durcissement des politiques de visas.
Un virage transactionnel assumé
En toile de fond, la volonté affichée de Donald Trump est claire : redéfinir la relation Afrique–États-Unis autour d’un paradigme purement transactionnel. L’African Growth and Opportunity Act (AGOA), principal cadre commercial entre les deux zones depuis 2000, pourrait ne pas être reconduit au-delà de 2025. L’administration américaine mise désormais sur des accords bilatéraux ciblés, laissant entendre que l’aide au développement laissera place à l’investissement privé et aux partenariats sécuritaires.
Dans ce nouveau jeu, les États invités à Washington pourraient bénéficier d’un statut de partenaires privilégiés. À condition de s’aligner sur les priorités stratégiques des États-Unis.












